L\'atmosphère à l\'Université de Ouagadougou

UO: "Les lendemains de l’année académique 2009-2010 ne seront pas des plus sereins"

L’auteur du texte ci-dessous s’insurge contre l’augmentation des frais d’inscription dans certaines filières à l’université de Ouagadougou. Selon lui, tout subodore une nouvelle année de troubles et d’agitations si cette nouvelle disposition n’est pas reconsidérée.

Au risque de passer pour un oiseau de mauvais augure, il y a fort à parier que les lendemains de l’année académique 2009-2010 ne seront pas des plus sereins à l’Université de Ouagadougou (UO). Après les agitations et perturbations des années 2008, 2009 et 2010, tous les ingrédients semblent réunis pour que 2011 soit, à l’instar des précédentes, chaude voire détonante. Comme un coup de massue, une vague d’augmentation des frais d’inscription frappe l’université de Ouagadougou. Les premiers concernés en sont encore à se remettre de leurs émotions. Appréciez ! Nonobstant l’admission au test d’entrée en première année de journalisme et communication, les étudiants devront s’acquitter, pour compter de cette année académique, de la somme de 250 000 F CFA en guise de frais d’inscription contre 15 000 F CFA les années antérieures.

Il en est ainsi pour le département de traduction-interprétariat où les frais d’inscription ont également pris l’ascenseur l’an dernier pour monter à 265 000 F CFA contre 15 000 F CFA précédemment. Au-delà de la carence de pédagogie et de concertation dont a fait preuve l’administration universitaire dans la mise en œuvre brutale de cette mesure de revue à la hausse des frais d’inscription, ce qui décontenance plus d’un, c’est la proportion astronomique dans laquelle se situe cette augmentation. Ce n’est pas sérieux, c’est inadmissible, révoltant, scandaleux, indécent et choquant !

Bien que variés, les qualificatifs pour désigner la mesure expriment un même sentiment d’indignation et de mécontentement. Pour notre part, nous estimons que si ce n’est pas de la provocation, un casus belli à l’attention de la communauté estudiantine et des structures de "défense des intérêts matériels et moraux des étudiants", ces agissements des autorités universitaires y ressemblent bien. Ne soyons pas dupes ! Bien que l’effectif de ces deux écoles ne vaut même pas 1% de l’effectif global de l’université de Ouagadougou, bien que ladite université soit striée et compartimentée en départements, instituts et UFR dotés de relatives autonomies, il faut être d’une déconcertante simplicité d’esprit pour ne voir en cette inflation des frais d’inscription qu’un acte isolé qui se cantonnera uniquement à ces deux départements de l’UFR/Lettres, art et communication.

Et pour cause, dotée de la personnalité juridique, l’université de Ouagadougou, faut-il le rappeler, est une entité placée sous l’administration d’un président lui-même tenu en sujétion vis-à-vis du gouvernement à qui il doit sa nomination. Comment alors ne pas voir en cette augmentation des frais d’inscription, une décision émanant du sommet ou, pour tout le moins, avalisée par les hautes autorités et visant, à terme, l’extension et la généralisation aux autres Unités de formations et de recherches (UFR) et universités ? L’application de la mesure à ces deux départements, dans un premier temps, passe alors pour une expérimentation visant à sonder le terrain.

Toujours est-il que des interrogations subsistent quant à l’opportunité de cette flambée artificielle des frais d’inscription. A quoi bon cette augmentation exponentielle quand on sait que l’étudiant burkinabè ne roule pas sur l’or ? A quoi bon cette augmentation en ces temps où le SYNADEC redonne de la voix relativement à la non-tenue de ses engagements par la partie gouvernementale ? Vise-t-elle à en rajouter à la tension ambiante, en invitant dans la danse les syndicats estudiantins au risque de compromettre gravement le processus de normalisation du calendrier académique fait de téléscopages, d’enchevêtrements et d’imbrications d’années académiques ? Une chose est sûre, dans ce climat de ni paix, ni guerre qui prévaut à l’UO, cette mesure ne sera pas pour rasséréner acteurs et observateurs du secteur de l’enseignement supérieur public.

L’atteinte de l’équilibre des finances dans les universités publiques, qui est sans nul doute l’objectif poursuivi par les initiateurs de cette politique, disons-le clairement, est une chimère. Avec la santé, les sports, les loisirs et l’action sociale, entre autres, l’éducation relève des secteurs dits sociaux auxquels doit être consacrée une part substantielle du budget de l’Etat. Même si l’on estime que ces secteurs ne génèrent pas de l’argent. A décharge pour ces secteurs réputés improductifs, il faut néanmoins faire remarquer que dans une société civilisée, tout ne se rapporte pas qu’à l’économique et au financier. Il faut savoir mettre l’humain au centre de tout. Financer l’enseignement supérieur public n’est pas faire œuvre de charité !

La communauté estudiantine, en tout cas, de même que tout esprit avisé, nous osons le croire, ne le conçoit pas comme tel. La prospective (et il existe bien un ministère chargé de la Prospective dans notre pays !) permet d’appréhender ce que gagne un Etat qui, plus, est sous-développé, à porter à bout de bras, entre autres, l’éducation et la formation de sa jeunesse. Comme elle a toujours su si bien le faire, la communauté estudiantine, mise en face de ses responsabilités, se doit de s’assumer devant l’Histoire et les générations à venir.

Au lieu d’offrir le spectacle d’étudiants geignant, larmoyant, pleurant, grinçant des dents, se roulant par terre et s’apitoyant sur leur infortune, nous nous devons de dire non, avec la dernière énergie, à l’augmentation hors de proportion des frais d’inscription dans les filières sus-mentionnées. Faire donc barrage à ce qui apparaît comme un plan cynique et inique visant, à terme, l’épuration de l’université publique des couches économiques modestes et/ou des pauvres, est une question d’honnêteté et de probité intellectuelles. Fermons la porte avant que n’entre le fantôme à l’université de Ouagadougou, à l’université de Koudougou et à l’université polytechnique de Bobo-Dioulasso !

GNAON Nedanlou Ismaël Narcisse, étudiant en 3e année de droit à l’université de Ouagadougou/Le Pays



24/01/2011
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